Une expo d’Art Brut à Paris : The Museeum of everything. Inévitable sujet de polémiques !

Le titre de l’expo « The Museeum of everything » annonce bien le paradoxe lié à l’art brut. Si c’est n’importe quoi, pourquoi est-ce exposé dans un musée, même ittinérant ? James Brett, fondateur de la Chalet Society, et Marc-Olivier Wahler, ancien directeur du Palais de Tokyo, à l’occasion curateur de l’expo, ont jugé intéressant de rassembler ces choses, de les conserver et de les montrer à n’importe qui, à tout le monde, à vous… Les auteurs  ne sont pas des artistes ; ils n’ont pas étudié dans une école de Beaux-Arts, ils ne sont dans aucun réseau commercial. Les pièces ont souvent été retrouvées après le décès des individus qui ont fabriqué ces pièces pour eux-mêmes, comme les aquarelles et collages d’Henry Darger,  déjà exposées à La Maison Rouge en 2006. Mais elles attestent d’un véritable talent de dessinateur et de coloriste. C’est beau ! N’est-ce pas ?

Henry Darger, A découvert ils voient les nuages annonçant une tempête, 1930-1972, col. de l’Art Brut, Lausanne, Suisse

Les auteurs sont marginauxhandicapés mentaux, vivent en hopital psychiatrique, comme Judith Scott, trisomique, sourde et muette. Elle saisit un objet de son environnement et l’emmaillotte compulsivement pendant des mois dans un épais cocon de laines multicolores.

Judith Scott, expo « Objets secrets au collège des Bernardins,Paris, novembre 2011

C’est l’artiste Jean Dubuffet (1901-1985), avec l’écrivain Jean Paulhan (1884-1968) et le galeriste René Drouin (1905 – 1979), qui ont créé la notion d’Art Brut, en 1945. Après un rejet horrifié du public, de plus en plus de professionnels et d’amateurs reconnaissent à ces pièces une valeur esthétique. Elles racontent une histoire, le plus souvent dramatique, elles expriment des affects humains. Elles sont liées à une survie psychique. En 1971 Dubuffet fait don à la ville de Lausanne des oeuvres qu’il a collectées depuis plusieurs décennies dans les asiles psychiatriques ; ainsi naît La Collection de l’Art Brut de Lausanne.

L’art brut est entré récemment dans des collections publiques françaises : en 1999 le LAM , Musée d’art moderne de Lille Métropole, rassemble et présente des oeuvres d’Art brut.

Comment faire découvrir  ces oeuvres d’art sans les dénaturer, en respectant la dignité de leurs auteurs ?

Le lieu de l’exposition The Museeum of everything, une ancienne école catholique désaffectée, au fond d’une cour, 14 boulevart Raspail, à Paris, semble presque volontairement délabrée, comme le Palais de Tokyo, d’ailleurs. Marc -Olivier Wahler aime ces lieux déglingués-étudiés, ultime sophistication ; n’est-ce pas du snobisme ? Est-ce respectueux vis-à-vis des auteurs ? Je partage l’opinion de Lunettes Rouges sur la boutique, où sont proposées à la vente des reproductions débiles et hors de prix, sur torchons et mugs ! Mais je trouve sa critique, écrite en novembre 2012, en pleine polémique, trop sévère.

Certes, on se sent mal à l’aise dans ce labyrinthe de couloirs, petits escaliers et petites salles où les oeuvres nous dérangent ; les cartels sont mal faits, en anglais seulement. Snobisme encore ? Mais l’exposition a le mérite d’exister. Celà nous change des grandes expositions institutionnelles d’artistes connus et reconnus, où il faut faire la queue pendant des heures, et payer  cher son billet d’accès  !

J’ai adoré la salle dédié aux sculptures du collectif ACM, Alfred et Corinne Marié. Mais

ACM, 2011

est-ce vraiment de l’Art Brut ? Il a un site internet de son vivant présentant son travail. Peut-on lui reprocher de ne pas être assez marginal ?!  que de questions ! mais regardez ces palais merveilleux construits avec des débris de machines à écrire mécaniques. On ne peut s’arracher à la contemplation de ces sculptures de l’infiniment petit, où on découvre un nouveau motif ou personnage à chaque minute.

 

 

 

Alexander Lobanov, autoportrait, col. LAM

Les oeuvres d’art brut peuvent être l’objet de récupération commerciale, comme ce fut le cas des peintures d’Alexander Lobanov (1924-2003), handicapé mental et sourd-muet, qui a passé sa vie dans des  hopitaux psychiatriques en URSS. Il n’a cessé de peindre des autoportraits, grimmé en Lénine, Staline… toute sa misérable vie. Un témoignage intéressant de l’histoire de son pays.

L’exposition de la Chalet Society est visible jusqu’en février 2013, facile d’accès, pas de queue, prix conseillé : 5 euros… Le œuvres valent vraiment la visite ! Seront-elles récupérées par le marché de l’art dans un avenir proche ?

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FIAC hors les murs : des sculptures extraordinaires de Jaume Plensa à voir en accès libre !

Irma’s Head, 2008, courtesy galerie Lelong, paris

Après 19 heures 30, à la nuit tombée, allez Place Vendôme pour découvrir les trois sculptures monumentales de l’artiste catalan Jaume Plensa. Pour moi, le maillage de lettres en acier inoxydable  suggère un récit, ou  les pensées de cette femme. Il peut paraître paradoxal de représenter la pensée humaine, voire l’âme, par un vide à l’intérieur de la sculpture, mais c’est parfaitement réussi. Je ne vous raconte même pas la fabuleuse mise en lumière qui donne une aura particulière à l’oeuvre et suggère la spiritualité !

 

 

Istambul blues, 2010, courtesy Galerie Lelong, Paris

 

Pour Istambul Blues, l’artiste a créé un maillage de partition musicale dessinant la forme d’un homme colossal, 6 m 50 x 3 m 55  x  3 m 90 . Est-ce un musicien, un compositeur ? Je crains que cette interprétation soit trop simpliste. Qu’en pensez-vous ?

Je ne vous montre pas de photo de Yorkshire Soul, 2010. Dépêchez-vous d’aller la découvrir par vous-même !

J’ai cru comprendre que l’installation de Jaume Plensa resterai jusqu’à fin octobre, mais on ne sait jamais.. Les sculptures  pourraient bien ne plus être là après la fermeture de la FIAC.  Avis aux amateurs, ces pièces sont à vendre !

 

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Expo Bertille Bak à l’ARC du Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris : Découverte anthropologique !

L’arc est une petite structure  au sein du Musee d’Art Moderne présentant des artistes moins connus. j’aime bien ce lieu où on peut se confronter à l’art contemporain hors des sentiers battus. Même si certaines oeuvres suscitent  le scepticisme,  l’ennui ou le rejet, celà vaut souvent le déplacement. Je suis donc allée voir l’exposition de Bertille Bak « Circuits ».

 

Bertille Bak : Notes englouties

Dans une première salle l’artiste a installé 5 PILIs, Plans Indicateurs Lumineux d’Itinéraires ; sur chacun on peut choisir un point de départ, un point d’arrivée, et le trajet s’illumine ; assez banal ! Mais une bande sonore accompagne le trajet : ça grince, la sonnerie retentit, les portes s’ouvrent, puis après une autre sonnerie, les portent se referment et la rame repart. On entend parfois des bribes de conversations, des  musiciens. C’est long, ennuyeux ; toutes les 3 minutes, on entend quasiment la même séquence sonore ! Je persiste, attendant une surprise… mais non. Alors je regarde le PILI d’à côté ; c’est celui du métro de Berlin. Je choisis un trajet et écoute. L’ambiance sonore est un peu différente : ça grince moins, la sonnerie, plus douce, me rappelle un séjour à Berlin. Alors, je choisis également un trajet à Rome, Londres et Madrid. Et je tends l’oreille de l’un à l’autre, voyageant simultanément dans le métro des 5 capitales. Bertille Bak nous propose là une expérience sonore inédite ! infinie. L’installation s’intitule Notes englouties. Finalement, j’aime bien. Bon d’accord, aller au musée pour écouter l’ambiance sonore du métro, c’est spécial ! Habituellement, on fait le contraire : on va au musée en métro, pour ne pas se souvenir du trajet en métro !

 

Transport à dos d’hommes (capture d’écran vidéo)

Dans cette même salle est diffusée une musique tsigane un peu mélancolique  accompagnant la vidéo Transport à dos d’hommesDes « Gens du voyage », comme on dit, sont filmés dans leur caravane installée au bord de la voie d’un RER, vaquant à leurs activités quotidiennes : des enfants poussent des caddies de supermarché remplis de cadenas ou de coupes de récompenses sportives, probablement pour en tirer quelque argent. Quand les habitants de la caravane entendent le train arriver, ils descendent avec une manivelle une bâche de camoufflage peinte par les enfants, et leur présence se dissout dans le paysage. Je remarque cette bâche peinte  roulée contre un mur de la salle d’exposition. La vidéo est « sans paroles » ; on leur a coupé la parole. Mais qui peut m’expliquer le titre de la vidéo ? pourquoi « à dos d’hommes » ?

0¨quatrième (capture d’écran vidéo)

Dans la salle suivante passe une vidéo assez terrifiante 0 quatrième, présentant une sorte de maison de retraite où les pensionnaires portent un uniforme de moniales. Elles sont filmées dans leurs passe-temps quotidiens : l’une fabrique de petites poupées vêtues de laine crochetée. L’autre divise soigneusement des botins en deux  avec une paire de ciseaux, les glisse dans une housse en tissu cousue à la machine, les charge sur un caddie, prend l’ascenseur et va les poser un par un sur les bancs de la chapelle. Cette gestuelle répétitive et absurde inspire l‘ennui, puis de la compassion. Dans la même salle l’artiste a disposé dans des présentoirs vitrés les objets personnels des soeurs, leurs outils, les matériaux utilisés et des objets fabriqués.  Levant à nouveau mon regard vers la vidéo, j’assiste à une scène encore plus pénible : Une des religieuses âgées est assise sur un fauteuil monte-personnes ; hissée mécaniquement, elle colle une affichette sur un grand mur qui en est recouvert ; sur chacune est inscrite la même prière : « Près de toi Seigneur « . Par cette vidéo, l’artiste nous fait découvrir la vie d’une communauté religieuse Les Filles de la Charité, dans le couvent de la maison mère, à Paris. O quatrième correspond au dernier étage du bâtiment où vivent les soeurs atteignant le quatrième âge ; elles attendent que Dieu les rappelle à lui, au ciel !

J’apprécie  cette approche de groupes humain marginaux aussi variés ; des minorités vivant plus ou moins cachées, sur lesquelles les citoyens majoritaires ont  des préjugés. Sujets difficiles, traités avec retenue et délicatesse, suggérant au spectateur comme moi une certaine empathie.

Bref, ça n’est pas une exposition agréable à visiter mais elle ouvre l’esprit ! Et quand les vidéos nous ennuient, on peut regarder les objets disposés dans la même salle, ceux qui ont été filmés.  D’un point de vue à la fois artistique et scientifique, l’association d’une vidéo et d’une installation d’objet et un excellent format. Bravo à Bertille Bak !

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« Gerhard Richter : Panorama » : un peintre d’Histoire contemporain au centre Pompidou

Juin, 1983, huile sur toile

Quand j’ai vu pour la première fois des oeuvres de Gerhard Richter, au Musée d’Art Moderne de Saint-Etienne, j’ai été fascinée par ses «  Abstracte Bilder« ; ces tableaux aux couleurs vives suggèrent pour moi des paysages abstraits. L’exposition du Centre Pompidou rassemble une quantité de ces  tableaux impressionnants par leur format immense. J’ai retrouvé les monochromes gris des années soixante-dix, que je n’aime pas. C’est neutre, c’est plat, ennuyeux et triste ! Mais l’effet est très sûrement voulu par l’artiste. C’est le mode d’expression d’une mélancolie ; d’une angoisse ? quand Gerhard Richter revit le traumatisme de la guerre.

Ce qui m’a le plus interessée est justement la façon dont il se confronte à l’histoire difficile de son pays, par la peinture. En étant attentif, on repère en effet tout au long de la visite les références à l’histoire de l’Allemagne.

Bombardiers, 1963, huile sur toile

Gerhard Richter peint d’après des photos de presse, comme Bombardiers, 1963, ou d’albums de famille  : « Onkel Rudi » est peint en 2000, d’après une photo prise deux ans avant qu’il meure à la guerre. En uniforme de la Wehrmacht, on dirait même qu’il pose devant le mur de Berlin ! (imagination de ma part ? en tous les cas, l’analogie visuelle est forte). j’apprécie cette interrogation du paradigme  peinture/photo. La matière de l’oeuvre est lisse ; la peinture fait écran. L’image est à la fois précise et floutée. – résultat du passage d’un large pinceau sec, très doux, sur la matière à peine sèche -.Ces peintures « comme des photographies » troublent le spectateur. On se demande si c’est une photographie, ou un peinture, si une photographie rend mieux la réalité ?

Gerhard Richter est un des rares artistes à avoir présenté en peinture, en 1988 et 1989, cette épisode dramatique et compliqué de l’histoire allemande plus récente : la mort des leader de la «  Rote Amee Fraktion » (La Bande  Baader-Meinhof) dans la prison de Stammheim le 18 octobre 1977 . Dîtes-moi si vous connaissez un autre peintre qui ait traité ce sujet ! Ces oeuvres sont assez effrayantes : on distingue à peine des ombres de personnages. On ne sait pas si ce sont des apparitions ou des disparitions !

En revanche, contrairement à « Lunettes Rouges« , je suis passée devant Septembre, 2005, sans le voir ; c’est si gris, si fumeux ! Je n’ai pas percuté, Pas distingué les tours jumelles, pas perçu la référence au 11 septembre 2001.

 Gerhard Richter a même peint Queen Elizabeth,  1967, d’après une photographie de

Queen Elizabeth, 1967

1964. Ce portrait est actuellement exposé à la London National Portrait Gallery jusqu’au 21 octobre 2012. Cette peinture a été choisie comme couverture du numéro de juillet/aout du magazine Art Actuel.

La rétrospective de Beaubourg présente bien  la richesse du travail de Richter qui a abordé tous les genres de la peinture avec la même virtuosité.

Il a même revisité des chef-d’oeuvres de l’histoire de l’art : L’annonciation d’après Titien, en 1973. – le tableau de Titien date d’environ 1535 -. Deux tableaux de cette série de cinq sont exposés dans la deuxième salle. Richter a progressivement estompé le motif sur chaque toile. Au contraire, La Lectrice d’après Vermeer, 1994 – l’oeuvre de Vermeer date de 1659 – est peinte « comme une photographie » ; l’image est étonnamant lumineuse. 

6 panneaux de verre, 2002:2011

L’artiste a aussi créé des sculptures minimalistes en panneaux de verre. Une  façon de rappeler que  la peinture est une fenêtre ouverte sur le monde. Une structure de panneaux de verre est une autre forme de représentation plastique.

L’accrochage est assez neutre ; les grands tableaux abstraits sont très bien mis en valeur, à la lumière naturelle, dans les vastes espaces vitrés du dernier étage. Les commissaires de l’exposition ont évité le principal écueil : on ne se sent pas accablé par une quantité d’oeuvres trop importante.

Si vous avez le temps, regardez la vidéo de l’interview de l’artiste ( 1993). On peut le voir travailler les  » Abstrakte Bilder » perché sur un escabeau, armé d’un pinceau long de quatre mètres.

Jamais Gerhard Richter ne suit la mode du moment. Il est universel.

 

 

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Expo WANI à la Fondation d’entreprise Ricard : une esthétique de l’étrange et de l’incongru !

Farida Le Suavé, Contraire du solide, 2005

Non, ce n’est pas le nom d’un artiste, ni celui d’un mouvement. Alors, n’est-ce pas un concept marketing, inventé pour aiguiser l’appétit des amateurs d’art avides de nouveautés ? Concrètement, c’est une proposition d‘exposition des critiques d’art Paul Ardenne et Marie Maertens à la Fondation d’entreprise Ricard.  Je n’ai vraiment pas aimé les oeuvres en céramique de Farida Le Suavé, Contraire du solide ; Vous ne trouvez pas ça très moche ? Résistant à l’identification, paradoxales, comme dégonfflées, posées sur des ready made de tabouret en bois ou  de pouf tapissé de toile à matelas, elles sont peut-être là uniquement pour susciter le dégoût et le rejet ! Je ne vois pas leur intérêt esthétique ou intellectuel. C’est incongru, monstrueux !

En revanche, regardez les oeuvres de Vincent Kohler, Roots ! Cinq petites sculptures différentes sont acrochées au mur : doubles simulacres ! Je crois d’abord  apercevoir des bois flottés aux formes étranges, récupérés sur une plage, ou des racines ; le premier ressemble à un petit chien, le deuxième à un gros insecte effrayant. He bien non, ce sont des artéfacts,  petites sculptures en céramiques, fabrication extrêmement sofistiquée. C’est bluffant !

Vincent Kohler, Roots, 2010

Vincent Kohler, Roots, 2010

Camille Henrot, Objets augmentés (Tabouret de bureau, lampe de bureau), 2010

Tous proches, les Objets augmentés de Camille Henrot sont  écoeurants.  L’artiste extrait des pièces de mobilier de notre quotidien,  les recouvre de terre et les enduit manuellement de goudron. Franchement, ces oeuvres me mettent mal à l’aise. Je m’interdis de leur chercher une signification, puisque les oeuvres d’art « Wani », « ostensiblement, ne signigfient rien », écrit Paul Ardenne. Pourtant, les commissaires de l’exposition, eux-même, évoquent une « archéologie du futur« , interprétation qui me touche.

Laurent Tixador, Chasse à l'homme, 2011

Pour finir, interessons nous au performeur, Laurent Tixador, un des artistes les plus extrêmes exposés à la Fondation d’Entreprise Ricard. L’oeuvre en bois rappelant un massacre, qui expose en trophée non pas la tête mais les traces de pas du gibier, est moins impressionnante que la performance elle-même. Pour « Wani », l’artiste organise sa propre chasse à l’homme : Sur le réseau social Facebook, ils annonce à ses « amis » sa décision de se rendre à la Fondation Ricard pour le vernissage Wani, et les met au défi de le repérer durant son périple depuis Nantes, où il réside, jusqu’à la rue Boissy d’Anglas, lieu de l’exposition. Il promet une récompense de 1000 euros à qui le repérera le premier. S’il est pris, il n’apparaîtra pas au vernissage. Il ne s’est pas fait prendre et a pu être présent. C’est, en effet une performance ! Absurde !

Au fur et à mesure de la visite, il se dégage pourtant une certaine magie de cette exposition collective qui me laisse perplèxe. Les pièces présentées sous le terme WANI, contraction orale de OANIObjet  Artistique Non Identifié, ou bien Oeuvre d’Art Non Identifiable – semblent  échapper à toute récupération. Beaucoup. Après le 21 mai, nous ne pourrons plus voir ensemble, mais leur créateurs ont tous une galerie. Finalement, cette exposition est une bonne illustration du post-modernisme par sa richesse plastique protéiforme et hybride

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Jean-Michel Othoniel au Centre Pompidou : Je reste sceptique !

Le Kiosque des noctambules, 2000

Le rigolo baldaquin orné de perles de métal et de verre   à la station de métro Palais-Royal à Paris, c’est de lui. Ce montage de verroterie est très décoratif, mais féérique ???? Plutôt mièvre.  La rétrospective de Jean-Michel Othoniel au Centre Pompidou m’a laissée froide. J’ai beau relire les analyses de la commissaire, Catherine Grenier  – Beaux Arts Magazine n° 321 -, je ne ressens pas la dimension votive, religieuse et sacrée des oeuvres. D’après la critique, Natacha Wolinski, l’artiste métamorphose son deuil et ses blessures en perles de verre colorées, lumineuses et fragiles, enfilées en colliers et en bannières….
 

Le Bateau de larmes, 2004

 Comme Lunettes Rouges, j’ai été choquée par Le Bateau de larmes, 2004. Pour moi, cette oeuvre est insultante pour les boatpeople qui se sont noyés, si proches des côtes de la Floride, en espérant fuir la misère. Comment Othoniel peut-il récupérer cette pauvre coque de bois échouée et l’enguirlander de perles ?! Ha, j’oubliais, celà doit faire allusion à la « résurrection » de ces malheureux !!!!

L'Anus vert, 1992

Quant à L’Anus vert, 1992, vous ne trouvez pas qu’ on se moque de nous ?! Certes, l’astucieux jeu de miroirs révèle l’anatomie interne de cette sculpture de soufre, orifice traité en bijou de jade ! Faut-il s’extasier ? ou éclater de rire ?! Finalement j’ai bien aimé les titres. Savoureux, comme Post-tits, 1995 – des mamelons roses peints sur des post-it jaunes – ou  L’âme moulée au cul, 1989. Un vrai festival langagier, cru ! J-M. Othoniel est un véritable orfèvre des mots. Je suis étonnée que personne, à ma connaissance, ne l’ai remarqué. Comment Catherine Grenier peut-elle tenir un discours aussi sérieux, voire attristé, et oculter la drôlerie des titres ? L’artiste ne fait-il pas de l’humour érotique ? Ou alors, je n’ai rien compris. Il se prend très au sérieux. Jugez par vous-même et écoutez le commentaire de Mon Lit, 2003, par Jean-Michel Othoniel  . Il a l’air d’y croire ! Pour moi, c’est de la pure dérision ! Que gardera l’histoire de l’art ? À moins de ressusciter – en sculpture de verroteries » à la Othoniel », bien sûr -, je n’en saurai rien, mais je doute.

Bon, si vous allez voir l’expo François Morellet, en redescendant, visitez ce phénomène, et dites-moi ce que vous en pensez !  jusqu’au 21 mai 2011.

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MAC Lyon : Photos de la performance de Nikhil Chopra

Nikhil Chopra, Lyon, Musée d'Art Contemporain, 14 avril 2011

Merci au MAC Lyon d’avoir mis sur son site les photos de la performance de Nikhil Chopra du 14 avril 2011. Ainsi je peux compléter mon billet /art-contemporain/performance-de-lindien-nikhil-chopra-au-mac-lyon-long-long/

Cliquez sur le lien et regardez  Nikhil  !

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Réinstallations de François Morellet au Centre Pompidou : Quand géométrie et hasard riment avec humour et poésie !

Néons by accident, 2003

Je ne comprends pas la réprobation du blogueur Osskoor et admire, au contraire, Alfred Pacquement et Serge Lemoine d’avoir su garder dans l’expo du Centre Pompidou la légèreté, l’humour et la poésie  des réinstallations de François Morellet, 85 printemps ! En s’adaptant aux contraintes du lieu, l’artiste réactive des installations  datant des années soixante à nos jours. Dans la pratique de cette abstraction géométrique à partir de matériaux empruntés aux BTP et à la publicité, les néons colorés, le plasticien tient ses affects à distance et crée des oeuvres vides de tout message. Padoxalement ( ?), elles    

Pi Rococo n° 22, 1 = 10°, 1997-2008

éveillent  les émotions du spectateur ! – en tous cas les miennes -Peut-être à cause du halo baignant les arcs en tubes de néon et se reflétant au sol ? Regardez cette suite de boucles bleues qui évolue en descendant et en se contractant ! ça ne vous rappelle pas vos petits dessins tracés en écoutant le prof d’une oreille distraite, ou en apprenant sérieusement vos leçons ? François Morellet invente des systèmes absurdement logiques, qui ne servent à rien, mais qui râvissent le regard et l’âme ! Interrogé par Emmanuelle Lequeux poour Beaux Arts Magazine n° 322 d’avril, François Morellet reste modeste « Moi je trouvais que le néon faisait un grand spectacle chic et pas cher. »

 Mais la poésie et la beauté n’excluent pas l’humour et la provocation : La Joconde déformée de 1964 a été réinstallée. Le chef d’oeuvre de Leonard de Vinci est imprimé sur un drap agité par un courant d’air. Résultat : Elle est encore plus « moche » qu’au Louvre, et tellement drôle ! Elle ne cesse de « grimacer » !

Je vous recommande Reflets dans l’eau déformés par le spectateur de 1964. on peut créer « ses propres Morellet » et prendre des photos ! Quand l’art se démocratise ! En actionnant un levier, on fait naître des rides à la surface de l’eau, dans un bassin carré ; une grille constituée de trois lignes verticales et trois lignes horizontales en néon, fixée au plafond, se reflète en formes changeantes. Voilà ce que j’ai fait : 

Reflets dans l'eau déformés par F. Delaire, avril 2011, grâce au dispositif de F. Morellet

F. Delaire d'après le dispositif de F. Morellet, avril 2011

Picasso défiguré (Les Demoiselles d'Avignon), 2011

  J’ai encore bien ri au spectacle de Picasso défiguré (Les Demoiselles d’Avignon) de 2011.  L’artiste  s’amuse à désacraliser les chef d’oeuvres, du XXème, comme du XVIème siècle. En comparant avec la reproduction du tableau de 1907, on reconnaît chaque personnage debout réduit à la forme d’un rectangle. Finalement, une  réinterprétation juste un peu radicale de l’oeuvre fondatrice du cubisme !

 En revanche, je n’ai pas compris ni apprécié Papier 2,5° – 92,5°, trou (carré) 0°- 90° de 1982. Heureusement, Lunettes Rouges l’a bien expliqué ! Ne manquez pas cette exposition d’art contemporain, rafraîchissante et amusante, visible jusqu’au 4 juillet 2011. N’oubliez pas, l’art de l’installation est éphémère 

En plus, François Morellet a l’infinie délicatesse de nous laisser libres : « L’art commence tout simplement quand un spectateur décrète que cela en est ; quand on est seul à créer, ce n’est pas encore de l’art. »Cette phrase en satisfera plus d’un parmi ceux qui se sentent exclus de l’art contemporain !  

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Performance de l’Indien Nikhil Chopra au MAC Lyon : long ! long !

Nikhil Chopra, Yog Raj Chitrakar : memory drowing V, 2008

Jeudi 14 avril à 18 heures, j’arrive seule au Musée d’Art Contemporain, me demandant bien ce qui m’attend ; heureusement, je n’ai proposé à personne de m’accompagner ! A la caisse, le jeune homme me dit : « ça a déjà commencé. » Alors, je me précipite au deuxième étage, regrettant déjà d’avoir manqué quelque chose. Nikhil Chopra a déjà commencé à dormir dans un décor proche de celui de la Serpentine Galerie à Londres – où il a déjà performé  du 10 au 12 décembre 2008 -Sur chaque mur de la salle, une immense toile est punaisée ; un paysage y est  dessiné à grande échelle, très soigné. A Lyon l’artiste a gardé la représentation du Port d’Oslo que vous apercevez à gauche ; sur une autre cloison, une villa britannique et son jardin sont dessinés, puis, sur la troisième, le lac de Palabru en Ysère. La confrontation de ces lieux, très différents, est déconcertante, mais la finesse du trait, la monochromie harmonisent l’ensemble. Nikhil Chopra dort dans la rue, ou dans une sorte de camping rustique ; peut-être en Inde, contrairement aux destinations suggérées sur les murs  ! Au sol, des gamelles, des coffres, des vêtements sont dispersés. Il dort encore, étalé à même le sol, vêtu d’une chemise large et d’un pantalon traditionnel indien ; ça n’en finit pas… Puis il s’éveille, s’étire, s’assied derrière la table, applique de la mousse sur son visage avec un blaireau, se rase lentement…. ça dure un temps fou ! Impatiente, je vais revoir d’autres oeuvres ; quand je reviens, il a presque achevé le rasage et se lave la figure, puis il se maquille interminablement, enduit sont visage de blanc – référence au type humain occidental -, surligne son regard d’un trait noir, met du mascara sur ses cils, du rouge à lèvre. Alors, il enlève lentement sa chemise – de nuit – et se lave la poitrine.

 N’ayant pas pris de photo car un photographe professionnel était présent, je vous présente Nikhil Chopra sur la vidéo d’une autre performance qui a eu lieu au MCA de Chicago    Il est beau, il le sait. Il s’exhibe. Ne se prend-il pas lui même pour une oeuvre d’art ?

 Il met une chemise vert pâle au col et aux manchettes amidonnées, la boutonne lentement, puis enlève son pantalon traditionnel, enfile une pantalon de lainage très british et ajuste les bretelles. Il retire ses vieilles schaussures et met des bottes de cuir, endosse une redingottenoue un foulard façon Lavalière autour de son cou… C’est interminable ! les quelques spectateurs vont et viennent, comme moi. Puis il ajuste une perruque – raie au milieu, petit chignon sur la nuque – et pose un chapeau haut de forme sur sa tête. Il est méconnaissable !  Il se tient au garde-à-vous, sort lentement de la salle et revient quelques temps après pour se faire applaudir. Il est 19 heures 30.

Il faut encore attendre jusqu’à 20 heures la conférence de l’artiste et du commissaire  Gunnar B. Kvaran pour avoir des explications. Dommage, je ne peux pas rester. Toute personne pouvant me transmettre un petit compte-rendu de la conf. est bienvenue ! quelle est la signification de cet enchaînement de  gestes quotidiens, étiré dans le temps, transformé en rituel ? La lenteur des gestes fait-elle référence à la longue colonisation de l’Inde par les Britaniques  ? L‘Inde est à présent dans une ère post-colonniale où traditions indienne et britannique ont marqué la société.

J’apprécie le talent de dessinateur, de comédien et de mime de Nikhil Chopra. Le but de sa performance est sûrement de nous déranger. Comme trop souvent dans l’art contemporain le discours de l’artiste est nécessaire pour nous convaincre de l’intérêt de l’oeuvre.

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Expo INDIAN HIGHWAY VI au MAC, Lyon : Grande qualité des oeuvres, belle présentation !

Thukral & Tagra, Put it on (détail), 2011

  Je connaissais  Subodh Gupta, dont les oeuvres sont souvent présentées en France, par exemple au Jardin des Tuileries pendant  la FIAC 2010. Là j’ai découvert avec curiosité et plaisir 30 jeunes artistes indiens. Regardez ! Dès le hall du Musée d’Art Contemporain, on est accueilli par cet amusant papier peint de Thukral & Tagra. Chaque rose dissimule une saynette érotique différente. Je distingue une jambe nue de femme et une jambe d’homme en collant bleu, chaussée d’une botte rouge. Ce doit être Superman – il n’y a que lui pour s’habiller ainsi -, héros américain, très moral, mais peu sensuel. Clin d’oeil humoristique ?! Dans l’exposition on retrouve le même papier, couvrant les murs d’une chambre à coucher ; le lit est voilé de tulle blanc, des vêtements masculins et féminins sont accrochés à des patères, un tableau présente des divinités indiennes et le mode d’emploi illustré du préservatif ; au pied du lit attendent des tongs sur lesquelles  un préservatif est imprimé. L’installation fait référence à la religion indouiste, au mariage à l’occidentale, au sexe, au problème mondial du Sida. Le collectif d’artistes montre l’occidentalisation de la société indienne, les conséquences de la globalisation.. 

 Excepté cette idée générale, je me  demande quel est le fil conducteur de cette exposition, un peu catalogue, sans thématique déterminée. Les commissaires invoquent les flux migratoires, les problématiques tradition/modernité, mégalopole/ruralité, la mondialisation…  L’historien de l’art Gwilherm Perthuis, participant à une table ronde critique sur l’expo,   blog Les rendez-vous de la création contemporaine,  m’a fait comprendre ce qui est un peu gênant  :  » L’expo ne révèle pas de particularité indienne« . Même si on remarque des références à la tradition esthétique indienne comme celle de la miniature  pour Come Give Us a Speech de N. S. Harsha, 2008. Parmi la centaine de petits personnages, je reconnais Bill Gate, Ganesh, Gandi, Marcel Duchamp….

Jitish Kallat, Aquasaurus, 2008

 Ne manquez pas les véhicules-squelettes préhistoriques de  Jitish Kallat, présentés devant d’étranges portraits peints à l’acrylique par le même artiste. Dans les chevelures on distingue des paysages urbains ! Au deuxième étage du musée,

Valay Shende, Transit, 2008

 je suis impressionnée par le gigantisme d’une sculpture composée de milliers de pastilles en inox , Transit, de Valay Shende, 2010. C’est un camion à l’échelle 1, transportant au moins vingt personnes  assises sur la plate-forme, des hommes, des femmes, des enfants. Il faut regarder l’interminable vidéo dans les rétroviseurs pour comprendre qu’ils viennent d’un village lointain, très pauvre, pour travailler sur un chantier dans une mégalopole embouteillée.

Pour conclure, c’est une belle expo, très postmoderne !   Dans des salles spacieuses, le MAC propose des oeuvres très variées, plutôt faciles à aborder : peintures, sculptures, installations, performances, techniques mixtes. Itinérante, évolutive, après être passée par Londres, Oslo et Herning au Danemark, Indian Highway version IV s’est enrichie de quelques oeuvres à Lyon . Elle continuera à évoluer après le 31 juillet 2011, en s’installant à Rome, puis Moscou, Hong Kong, Singapour et Sao Polo, pour aboutir à New Delhi. Ceci permet d‘éviter l’autorité unique d’un centre dans la conception d’une exposition. Ainsi, chacun enlève et ajoute quelque chose. Il serait intéressant de voir tous les volets d’Indian Highway, et l’ensemble exposé au terminus. Dommage, ce ne sera pas possible pour moi !

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